Fondateur et CEO de Geolink Expansion, Gwénaël Le Guennec accompagne depuis plus de 10 ans les collectivités dans leur démarche d’attractivité. Il revient, à veille du webinar ‘Les écosystèmes, une grille de lecture au service d’actions à impact pour les territoires’ sur les atouts d’une approche parfaitement adaptée, selon lui, aux enjeux contemporains des territoires.
Le rôle des territoires a considérablement évolué. Que leur apporte une approche davantage basée sur les écosystèmes ?
Elle leur permet d’enrichir leur réflexion en leur proposant une grille de lecture qui prend davantage en compte les enjeux du territoire. Plus axée sur les usages, elle répond aux problématiques territoriales sous un angle plus large qu’auparavant. Elle participe notamment à dépasser les classiques codes NAF et APE et à imaginer une nouvelle nomenclature qui complète l’approche par filière. La crise sanitaire, les évolutions comportementales, la réglementation comme les politiques publiques et les nouvelles tendances investissements invitent plus que jamais entreprises et territoires à travailler main dans la main. Dès lors, penser le territoire sous le prisme d’une grille de lecture écosystémique devient, sans faire table rase du passé, nécessaire pour appréhender le territoire dans sa globalité et répondre à ses enjeux mais aussi à ceux de ses habitants.
L’analyse écosystémique s’impose donc comme le complément naturel de l’analyse par filière ?
Les partenariats, les synergies dépassent aujourd’hui largement ce cadre. Comment réfléchir aujourd’hui sur l’alimentation saine et durable sans englober les enjeux de transition écologique et de santé voire de formation ? La richesse et la diversité des thématiques dont le territoire s’est emparé au cours des dernières années avec la loi NOTRe – et encore plus depuis la crise sanitaire – l’amène à avoir une vision 360° sur les potentielles synergies… Pour autant, il faut comprendre que l’analyse par écosystème ne se substitue pas à la classique approche par filière, elle l’enrichit pour mieux aider le territoire à faire face aux grands défis auxquels il est confronté.
Des synergies qui concernent également les services internes des collectivités locales…
Tout à fait. Pour donner sa pleine mesure, l’analyse par écosystème implique de mutualiser les savoir et les savoir-faire. Elle permet de favoriser les coopérations entre les différents services qui composent la collectivité : aménagement, urbanisme, développement économique… c’est la collaboration de toutes ces entités qui contribue à son efficacité.
Qu’est ce qui caractérise cette approche par écosystème ?
Elle se base sur une analyse sans concession des forces en présence sur le territoire. Pour être efficace, il est donc indispensable d’aller à la rencontre de chaque acteur. Institutionnels, citoyens, professionnels… en interrogeant l’ensemble des composantes du territoire, il est possible de faire surgir les points de convergence et d’identifier les chainons qui permettront de répondre aux besoins exprimés conjointement par l’ensemble des acteurs endogènes. En raisonnant en écosystème, il est possible d’identifier les profils d’entreprise qui seront les plus à même de répondre individuellement et collectivement aux aspirations du territoire.
Pouvez-vous en dire plus ?
Cette approche par écosystème a un but : renforcer les synergies. En multipliant les partenariats, on consolide le voire les écosystèmes en place et on initie un cercle vertueux au sens où plus ce dernier se renforce et plus il devient attractif pour les entreprises exogènes. Dans certains cas, on assiste même à la mise en place d’écosystèmes qui dépassent le cadre géographique du territoire mais contribuent néanmoins à l’enrichir car ils s’inscrivent dans une vision partagée entre toutes les parties prenantes qu’il s‘agisse des entreprises ou des collectivités.
Une analyse qui fait écho à cette réflexion autour de la raison d’être ?
La raison d’être dépasse la simple performance économique et désigne une ambition d’intérêt général qui dépasse le périmètre strict du de la performance économique et englobe des aspects sociaux et environnementaux tout aussi importants. Réfléchir sur sa raison d’être, c’est réfléchir à ce qu’on veut pour le territoire à moyen et long terme. Où est-ce que je serai dans trois ans ? C’est une question indispensable à se poser pour mener des actions qui puissent avoir un réel impact sur les populations au sein d’un espace, le territoire, donné. C’est également l’opportunité pour la collectivité de repenser son approche et de la rationnaliser. Le rôle du développeur territorial est-il réellement de traiter une centaine de dossiers par an ou au contraire de réaliser une sélection plus drastique mais objectivement plus adapté aux enjeux du territoire ? Finalement la grille d’analyse est toujours là même : ce projet peut-il impacter durablement les habitants de mon territoire ? Attention, cela ne veut pas dire ne plus regarder les autres projets mais d’autres acteurs privés notamment peuvent parfaitement gérer ces dossiers non prioritaires pour le territoire.
Quels sont justement, selon vous, les grands enjeux des territoires ?
Mobilité, santé et autonomie, formation et travail de demain, alimentation saine et durable, inclusion, transition écologique, tourisme… ils sont nombreux et bien souvent étroitement entremêlés. Ils s’inscrivent d’ailleurs pleinement dans la stratégie du Gouvernement en lien direct avec le plan de relance annoncé fin 2020. Ils sont également une réponse apportée aux problématiques de souveraineté et de relocalisation. Si envisager une relocalisation massive relève, à mon sens, du fantasme, il est tout à fait possible de l’envisager de façon très ciblée. L’approche peut y contribuer en révélant des manques et en permettant dès lors d’identifier très finement les porteurs de projet susceptibles d’y répondre. Quelque part, c’est une façon pour les collectivités d’intégrer une démarche RSE et de créer ainsi de la valeur tout en renforçant le sentiment d’appartenance au territoire.
Avez-vous des exemples ?
D’une façon ou d’une autre presque tous les territoires ont adopté cette démarche. On pourrait, par exemple, citer Pays Cœur d’Hérault qui, depuis une dizaine d’années, a intégré dans sa démarche d’attractivité une réelle politique RH et RSE matérialisé par la création d’une charte articulée autour d’engagements forts partagée par l’ensemble des acteurs du territoire. De nouveaux indicateurs voient également le jour et offrent un nouveau regard sur le territoire et son développement. C’est, par exemple, le cas de l’Agence pour le Développement Economique de la Région Lyonnaise (Aderly) qui porte un regard tout particulier sur l’empreinte socio-économique des entreprises qu’elle accompagne. On constate également que de plus en plus de territoires ne sont plus aujourd’hui à la recherche de quantité mais de projets, notamment sur certaines niches, qui peuvent répondre à leurs enjeux. Tout l’intérêt de l’analyse par écosystème est ici : identifier les manques pour aller chercher les acteurs locaux ou à proximité permettant de les combler. Un véritable changement d’approche.
- Innovation et écosystème : Comment la technologie est en mesure de rendre un système innovant ? L’exemple de Nantes Saint-Nazaire Développement.
- L’écosystème, un espace où partager, collaborer et expérimenter : COODIO, un écosystème autour d’une expérience utilisateur en pleine transformation (usage de l’audio et de la voix). L’exemple de Montpellier Méditerranée Métropole.
- L’écosystème, un outil pour répondre aux grands enjeux du territoire : Une nouvelle approche pour élaborer des stratégies (de prospection et d’attractivité) en corrélation avec les grands enjeux économiques, sociaux et environnementaux du territoire. L’exemple de Grand-Orly Seine Bièvre.